La librairie est morte, vive la... ?

La quoi ?
Le monde de la librairie vit une mutation sans précédent, le commerce électronique et la dématérialisation du livre .
Comment les libraires doivent-ils s'adapter à cette nouvelle donne ?
Si la librairie d'aujourd'hui est morte, alors quelle sera-t-elle demain ?

mardi 22 septembre 2015

Les métiers du li(v)re peuvent-ils être open-source ? Pour un commun du li(v)re ?




Suite à un premier billet dans lequel je posais la question suivante : "La librairie peut-être open-source", ici, il semblait opportun de se poser la même question sur l'ensemble des professions constituant cette fameuse "chaine" du livre.

Quand un site comme Influencia, ici, commence à parler d'open-source, c'est que décidément quelque chose est en train de se passer. On peut même se poser la question de leur retard quant au phénomène...
Définition courte : "Partager, participer, améliorer" et où l'on parle "d'Open minded".

Voir la définition ici, et ici.

Et quid du rapport Lemoine, qui a révélé toute la pertinence de ce blog, je vous renvoie au billet intitulé : "La librairie du futur", ici.
Ainsi que 14 propositions directement retenues : "Pour une économie open"

Alors comment... :
  • Comment imaginer une plateforme collaborative open-source à haute valeur ?
  • Comment créer un commun libre orienté "métiers du livre" ?
  • Comment déployer un outil technologique visant à fédérer libraires et éditeurs indépendants ?
  • Comment constituer une force collaborative face à Amz notamment
Je vous invite à découvrir quelques réponses, ici.

Mangroov'


J'aime à citer l'origine du nom, la mangrove : 

"La mangrove est parmi les écosystèmes maritimes les plus productifs en biomasse de notre planète et contribue à la résilience écologique des écosystèmes après les cyclones et tsunamis. 
On les trouve aussi… à l'embouchure de certains fleuves » (wikipédia)... comme le gigantesque fleuve Amazon(e) dont la démesure n’a d’égal que son règne sans partage."

L'idée donc de cette plateforme est de s'appuyer sur des outils open-source très performants et extrêmement agiles afin de proposer aux métiers du li(v)re la possibilité de répondre aux besoins des clients et des professionnels.
Et comme le dit Florence Berthier dans son article, de créer des "communautés de créateurs, de contributeurs et de consommateurs" : bref de retrouver "confiance et crédibilité"...

Mangroov' ajoute un élément non négligeable : la notion de "bien commun du li(v)re", qui représente l'un des fondements de sa construction.
Mangroov' est lancée, c'est un magnifique laboratoire d'idées en "open minded", je dirais en bon français que l'esprit y est ouvert à 360°, et toute personne souhaitant participer, en toute indépendance, semble la bien venue, afin d'imaginer de nouvelles solutions, un éco-système collaboratif du livre garant de la résistance (résilience), et du développement de ces métiers d'avenir qu'est l'éco-système éditorial dont font aussi parties les libraires.

Voici donc peut-être arrivée, cette plateforme neutre, libre et indépendante tant attendue, capable de réunir autour d'une table (ronde) toutes les professions du li(v)re : libraires, éditeurs, imprimeurs, bibliothèques. Un "open middleware", collaboratif et fédérateur au service des clients et en total respect des valeurs universelles de la culture et du li(v)re.

Le livre et la lecture vous tiennent en joie !

jeudi 27 août 2015

La leçon (Vidéo) : Les barbares attaquent le livre...


 « On ne résout pas un problème avec les modes de pensée qui l’on engendré ».  Einstein


"La révolution à l’œuvre [...] a bouleversé la société dans toutes ses dimensions, rendant les paradigmes d'hier inopérants pour s'imposer dans l'économie de demain"
 
"Entreprendre et gouverner après la révolution numérique". 

Nicolas Colin dans cet exercice maintenant (re)connu qu'est la conférence de The Family : Les barbares attaquent...

Voici la vidéo : Les barbares attaquent le livre


 
Et voici le compte rendu :


  

 No comment.

Le livre et la lecture vous tiennent en joie !

mercredi 6 mai 2015

Amz, killer ?




 Tout est un question de virgule...






 L'un des derniers articles parus sur Amz est particulièrement intéressant.

Il y a quelques années maintenant, je me disais que la librairie du futur devait être à peu prêt le lieu de ce qu'est et fait Amz en ligne.
En y ajoutant notre touche française, celle de la rencontre des cultures, celle de l'histoire transverse de notre territoire, riche des échanges, des partages et des fusions.
Celle du respect des autres et de chacun, celle de la mise en valeur de nos savoirs, qu'ils soient "littéraires" et"scientifiques".
Celle, encore, du respect des auteurs, des œuvres et de ceux qui leur font rencontrer un public : lecteurs, libraires, bibliothécaires, aujourd'hui blogueurs... Bref tous ceux qui aiment à promouvoir le li(v)re.
Ce que fait aussi, il faut le reconnaitre Amz.




Or, la librairie du futur, dont je rappelle que le rapport Lemoine a consacré la formule, devait à mon sens, aller chercher son salut dans l'hybridation de tout ce qui change notre société et les clients (nous) qui la composons aujourd'hui :


 la relation client, le li(v)re, le design des points de vente, la consommation et l'économie collaboratives, la technologie (contenus, formats, supports...etc.), l'expérience client, la convivialité, le management, l'impression (POD...)... et bien d'autres choses encore.

Mais dans ce dernier article, je comprends en quoi Amz poursuit un chemin foncièrement génétique, celui de l'efficacité, pour ne pas dire de l'efficience et tous les termes voisins que sont productivité, rendement...etc.
Vous me direz que c'est bien la fin de toute entreprise ? Certes.
Ce qui me gêne n'est pas le fond (encore que), mais la forme.

Ce qu'Amz est en train de faire, c'est la suppression de l'humain dans toutes les transactions. C'est déjà le cas (Cf. la robotisation de ses centres de logistique, voire le traitement de ses salariés, humains robotisés, à quand les robots humanoïdes ?...), mais en s'attaquant au retail, et en y intégrant tous les derniers joujoux technologiques : cameras, capteurs sensoriels, RFID, paiement sans contact... etc., nous entrons dans un monde de la déshumanisation, dans lequel, le seul humain est le client qui se fait calculer sous tous les angles, et repart tranquillement en ayant pris ses articles et payé juste en passant devant une usine à robots observateurs, reconnaisseurs, calculateurs, "transactionneurs"...

Quel progrès !

Je pense qu'aujourd'hui que le chemin est bien celui d'humaniser la platerforme web et non de déshumaniser le point de vente.
C'est en ce sens, que doit s'organiser la résistance, dont la France pourrait être le porte étendard. Non, en se cachant derrière de vils raisons de refus de la technologie mais bien en s'en servant pour ce qu'elle est : un outil, à notre service.

J'aime la France, non quand elle est recroquevillée dans son village gaulois, en attendant que le ciel lui tombe sur la tête, mais de celle qui absorbe les nouveautés pour les digérer, les transformer, les recréer et les partager pour un monde plus juste et respectueux des droits de l'humanité.

C'est bien un contre-pied qu'il faut prendre et je me réjouis de la stratégie d'Amz qui laisse un champ d'exploration et de créativité inespéré à notre métier.

Nous en reparlerons très prochainement, il est peut-être temps de montrer ce que pourrait être la librairie du XXIe siècle, la librairie du futur.

Le temps de la résistance active est venue.

"Quelles que soient nos infirmités personnelles, la noblesse de notre métier s'enracinera toujours dans deux engagements difficiles à maintenir : le refus de mentir sur ce que l'on sait et la résistance à l'oppression."
Albert Camus

vendredi 24 avril 2015

Le marché du livre : offre ou demande ?

Au salon du livre de Paris, qui ressemble de plus en plus à un salon pour les éditeurs que pour le livre, j'ai assisté au débat :

"L'impression à la demande en librairies : Chimère ou réalité ?"


Etaient présents sur l'estrade :  Christian Vié (directeur d’Orséry), Noémie Derhan (chargée de relations France de BoD), Hubert Pédurand (directeur du bureau d’études de l’UNIIC, Union Nationale des Industries de l'Impression et de la Communication, et responasable du projet Ireneo via l'EBM), Renny Aupetit (directeur associé de lalibrairie.com), Pascal Lenoir (directeur de la production des éditions Gallimard et directeur de la CCFI, Compagnie des chefs de fabrication de l'imprimerie et des industries graphiques) et animé par Baptiste Liger de L’Express.

Intéressant ce titre, non ?
Chimère...
Une chimère est une créature mythologique malfaisante...
Le ton était donné.

J'ai ainsi eu l'impression d'assister à un dialogue de sourds entre deux conceptions du monde du livre (que l'on retrouve en économie) : marché de l'offre ou marché de la demande ?

Vous savez, pour ceux qui me lisent depuis un petit moment maintenant, que je suis un fervent défenseur du "et", et donc qu'elle n'a pas été ma surprise de constater que nous en étions encore là... Bref.

Et si le marché du livre était une banane, disons pointes vers le haut (soyons optimistes), de quel côté le/la manger ?



François Hollande et Fleur Pelerin devant l'Espresso Book Machine du programme Ireneo, stand du salon du livre de Paris 2015




Classique, les personnalités représentants la demande sont celles qui impriment (à la demande)  : BOD, Ireneo et Orséry, les autres qui représentent l'offre sont celles qui éditent et vendent : le libraire et l'éditeur présent, ici Gallimard.

Mais ne mélangeons-nous pas ici l'offre de contenu et la demande de "produit", de matérialisation et d'achat du contenu ?

On sait que l'évolution de la consommation (collaborative) évolue sans cesse un peu plus vers la demande : vélos, voitures, outillages... une manière de consommer une utilisation, plutôt qu'un bien.
C'est aussi, dans le domaine de la culture, ce que l'on nomme communément le streaming : musique, vidéo... le livre ?
Ici, nous sommes dans un entre-deux, la possibilité de rematérialiser les contenus numériques en quelques minutes et à l'unité, soit directement sur le point de vente (Ireneo et Orséry), soit chez l'imprimeur (BoD).


 Stand Orséry, salon du livre de Paris 2015








Côté éditeurs, on publie en "x" exemplaires pour diffusion et distribution en librairie, générant potentiellement des retours.
J'ai déjà écrit sur ce sujet dans un précédent billet, dans lequel j'abordais la notion d'économie circulaire, non dans une chaine de valeur du livre, mais une constellation de valeur du li(v)re : ici.
Evidemment, partisan du "et", je suis plutôt très favorable à l'intégration de tels outils en librairie, à l'inverse du libraire présent qui, selon ses termes, n'est pas un opérateur de saisie.
D'ailleurs, je reste convaincu que les 3 canaux pourraient tout à fait se compléter : le canal du LAD (Livre à la demande) in situ en librairie, le canal du POD (Impression à la demande) mais régionalisé, et le canal de l'impression classique pour certains offices et les "best" en quantité, peut-être aussi régionalisé.
Mais imaginer matérialiser un contenu en moins de 5mn devant le client rend service à l'éditeur pour la vente de ses titres, notamment épuisés, et permet au libraire de proposer une offre très étendue, sans stock, donc sans livraison, rangement, retour...
Et si ces machines étaient capables d'imprimer bien d'autres choses...

Bref, la technologie avance et semble présentait un panel d'outils qui devrait rendre service au libraire, donc à l'éditeur et à l'auteur...

Que du bonheur ?

 A suivre...


Manuel Vals devant l'Espresso Book Machine du programme Ireneo, stand du salon du livre 2015


Comme quoi, nos politiques sont intéressés...

samedi 17 janvier 2015

Eloge du Lieu

C'est une véritable obsession depuis que je suis entré en librairie, l'obsession du Lieu.
Je ne pensais pas il y a maintenant une vingtaine d'années, que cela prendrait autant d'importance, car à l'époque les effets d'internet et des médias sociaux, même si on les préssentait, n'étaient pas encore réalité...

Cette obsession vient peut-être du fait que j'ai commencé à travailler dans le Nord plus précisément dans le bassin minier (aujourd'hui élu au patrimoine mondial de l'UNESCO), là où "le" culturel (officiel) avait du mal à prendre pied... (Cf. l'installation du Louvre à Lens).

Or, cette région Nord et Pas de Calais est "la" région du (des) Lieu(x), certainement liée à son passé industriel. Donc peut-être ai-je été dès le départ saisi par cette nécessité de se retrouver dans les Lieux tiers, entre le chez soi et le travail, on les appelait les Estaminets, ancestralement café multi-services.

Bref, le Lieu a toujours eu son importance social, et on a peut-être (trop) vite cru qu'il disparaitrait sur l'autel des réseaux sociaux sur lesquels bon nombre cherche à crever les plafonds d'amis.

Quid de l'incarnation, de ce besoin viscéral que nous avons de nous rencontrer dans des Lieux ?

Mon obsession a grandi (pour ne pas dire vieilli;) avec moi et prend une toute autre ampleur aujourd'hui.
le Lieu ne deviendrait-il pas une nécessité (urgente) ?
Mais quel Lieu ?

Il y a donc bien longtemps que je me pose la question du Lieu librairie, qui n'est autre qu'un lieu de commerce de livres. Uniquement ?
J'ai rarement rencontré, à l'inverse de ce que disent les libraires, de véritables Lieux de vie du livre.
L'évolution de l'économie, de la production de masse et de la consommation qui va avec depuis ces dernières décennies, ont façonné les commerces (avant, de proximité) en lieu de distribution de produits à mettre dans les rayons et en libre service pour le client.
D'ailleurs, on a vu naitre la "grande distribution".
Mais même les commerces de centre ville sont devenus des magasins de moyenne et petite distribution, accompagné d'un accueil de moins en moins agréable. Moins "familial" ?
La relation, l'expérience client ont été sacrifiées sur l'autel de la distribution.
Or, le commerce, ce n'est pas de la distribution, quelque soit sa taille.
Le commerce, le vrai, est un lieu de relation, d'échange social dans lequel on en profite pour acheter ce dont on a besoin ou ce qui (nous) fait plaisir.

La librairie a subi et présente aujourd'hui ces mêmes travers.
Ce sont pour la grande majorité des lieux de vente de livres. Je ne reviendrais pas sur l'élitisme parfois (encore) présent, l'accueil aléatoire... Je vous renvoie au rapport de l'Obsoco.

Je reviens au Lieu, et peut-être devrions-nous nous entendre sur la notion de Lieu.
C'est ce que tente deux livres que je viens de découvrir, un que je suis en train de lire, un autre dont qui est sorti cette semaine.

Le premier s'intitule :"The great good place" de Ray Oldenburg dont j'ai déjà parlé dans un billet précédant.
Ray Oldenburg est professeur de sociologie en Floride, et évoque dans ce livre la notion de "great good place" ou de " third place"...


Ce qui me permet de faire la transition vers le livre d'Antoine Burret, "Tiers-Lieux, et plus si affinités" qui sorti chez l'excellent éditeur Fyp en ce mois de janvier 2015.
Vous pouvez d'ores et déjà vous familiariser avec cet esprit, en consultant le wiki MoviLab.
De la nécessité de Lieux qui intègrent en plein les évolutions de notre société, en intégrant également le numérique dans toute sa complexité, mais en en faisant aussi un outil universel de partage et d'ouverture.
Le tiers-lieu intégrant également l'esprit d'Open source.

Voici un résumé et un historique en images par Yoann Duriaux : 


Enfin, c'est en lisant un article sur Simone Weil que Michel Dussault, enseignant-géographe à l'ENS de Lyon, apporte un élément supplémentaire, cher à Simone : la notion d'ancrage, d'enracinement. 

Je cite Michel Dussault (Philosophie Magazine) :
"Pour moi la géographie ne se réduit pas à la topographie, à l'étude de la localisation des faits sur une étendue. Je la définis beaucoup plus comme une anthropologie de l'habitation humaine.
Le problématique centrale de la géographie qui m'intéresse est celle des relations que les individus nouent avec leurs espaces de vie. Nous nous installons dans des lieux dont nous héritons, et qu'en même temps nous construisons, nous modifions - nous sommes donc à la fois des "receveurs" et des bâtisseurs. Mais toujours, l'homme a un besoin fondamental de s'ancrer dans un espace, de déployer son existence à partir d'un lieu, d'un habitat d'origine. L'intuition géniale de Simone Weil est de dire  que l'enracinement dans un territoire est une condition de tenue de l'être humain - s'il n'a pas cet ancrage dans un espace qui n'est pas seulement fonctionnel, mais également culturel et spirituel, au sein duquel il se constitue en tant qu'être parlant et agissant, il n'a plus d'étai et s'effondre."
(...)
Faisant référence au livre "L'accélération" d'Hartmut Rosa :
"Or, par la circulation ultrarapide des êtres et des choses qu'elle promeut, la mondialisation peut faire de nous des déracinés. Une forme de l'aliénation actuelle consiste à ne plus avoir d'ancrages, de haltes où se poser. Dès lors, un travail de ré-enracinement devient une exigence impérieuse  pour les individus nomadisés. Ce travail passe par la réappropriation  de lieux où inscrire son histoire (...), de produire du récit sur des espaces où l'on s'insère et se reconnait.
(...)
Quand il se sent aliéné, opprimé, étranger à lui-même, l'individu invente des espaces où se ré-ancrer : un village, une contrée, une place, (la librairie ?) mais cela peut-être son propre corps..."

Tous mes voeux pour cette nouvelle année 2015.

Le Lieu, le livre et la lecture vous tiennent en joie.